Déterminant
Guide
Le texte suivant introduit les déterminants en en donnant
une construction puis donne quelques propriétés.
On espère compléter ultérieurement la partie
déterminant et systèmes linéaires.
Déterminant des matrices
Définition de l'application déterminant
Soit
Mn,m(
K) l'ensemble des matrices à coefficients dans un corps
K (égal à
ou
) ayant
n lignes et
m colonnes,
Mn(
K) l'ensemble des matrices carrées d'ordre
n à coefficients dans
K. On note
-
In la matrice identité d'ordre
n
-
A = ((aij)) où
i est l'indice des lignes et
j l'indice
des colonnes
-
A1, ..., An ses
n colonnes :
A=(A1, ..., An).
Théorème : Il existe une
unique application
, appelée
déterminant vérifiant les propriétés suivantes
-
(D1) pour tout
j=1,..., n, pour tous
a et
b appartenant à
K,
pour
A1,..., An et
Bj des vecteurs colonnes,
+
.
-
(D2) s'il existe un indice
j tel que
,
.
-
(D3)
.
La propriété
(D2) est vraie même si les colonnes ne sont pas à côté l'une de l'autre, nous le démontrons à partir des propriétés telles qu'elles ont été énoncés ici :
(D'2) s'il existe des indices
j et
k tels que
,
.
Conséquences immédiates de la définition
-
Echanger deux colonnes consécutives change le signe du déterminant.
Démonstration
d'après
(D2).
=
=
+
+
d'après
(D1),
=
d'après
(D2).
Donc,
- S'il existe deux indices
j et
k différents tels que
Aj = Ak = B,
Si deux colonnes sont égales ou proportionnelles, le déterminant est nul.
Démonstration
En échangeant successivement la
i-ième colonne avec
sa voisine de manière à l'amener à la place
j-1, on se retrouve dans
le cas où les deux colonnes égales sont côte à côte (d'après la
propriété précédente, le signe a peut-être changé).
- si
,
Echanger deux colonnes consécutives change le signe du déterminant.
Démonstration
On réapplique la même astuce que dans le premier cas, en utilisant
et en développant.
- si
On ne change pas le déterminant
en ajoutant à une colonne une combinaison linéaire des
autres colonnes.
Démonstration
+
d'après
(D1),
d'après
(D2).
- Si
où
B est mis à la place de la
m-ième colonne.
Démonstration
=
=
+...+
+...+
d'après
(D1)
=
d'après
(D2)
=
Petits cas
Pour
n=1, on a nécessairement
.
Pour
n=2, on a nécessairement
det
= det
=
det
+
det
=
a det
+ c det
=
a ( det
+
det
)
+ c (det
+det
)
=
a ( 0 + d) det
+
c (
b det
+ 0)
=
ad -bc
Développement par rapport à une colonne
Soit
Aij la matrice extraite de
A obtenue en enlevant la
i-ième ligne
et la
j-ième colonne. Alors,
Idée de la démonstration
Faisons la démonstration pour le développement par rapport à la première colonne.
On écrit
avec
Ei le vecteur colonne formé de
0 sauf à la
i-ième ligne
où il y a
1. On a grâce à
(D1)
Regardons le terme
.
En faisant des manipulations sur les colonnes du type
remplacer
Ak par
Ak - aik Ei, on obtient que
où
est la colonne
Ak où on remplace le
i-ième élément par
0.
On remarque alors que l'application qui à une matrice
B d'ordre
n-1 associe
avec
la matrice colonne obtenue à partir de
B en rajoutant un
0
à la place
i, vérifie les deux premières propriétés du déterminant
et vaut
sur l'identité
In-1. Donc
.
Exemple :
Dans l'exemple ci-dessus, par rapport à quelle colonne a-t-on développé ?
=
Démonstration de l'existence et de l'unicité
Supposons par récurrence que l'existence et l'unicité de
det sont démontrés sur
Mn-1(K) avec
n>1. La fonction déterminant sur
Mn-1(K) est notée en vert : det
Suposons l'existence de det sur
Mn(K)
et montrons son
unicité.
-
Fixons deux entiers
i et
j. A une matrice
B=(bij) de
Mn-1(K),
on attache la matrice
B(i,j) obtenue en rajoutant une colonne à la place
i et une ligne à la place
j formées de 0
sauf à leur intersection où l'on met 1 :
Par exemple
:
La fonction
B
(-1)i+j det
B(i,j) satisfait toutes les propriétés
pour le déterminant sur
Mn-1(K) et lui est donc
égale : pour D1 et (D2), faites-le ! le signe garantit la condition pour (D3), car d'après (D1), si on part de la matrice Id(i,j), après échanges de colonnes voisines, le coefficient 1 arrive sur la diagonale et le signe est devenu 1.
Le faire par exemple pour
Id(4,3)=
-
Par
(D1) et
(D3) (voir
conséquences immédiates
), det
B(i,j)) ne change pas si on met n'importe quel coefficient
à la
i-ième ligne hors la
j-ième colonne.
-
Si la fonction det existe pour
Mn,n(K), on trouve par
(D1) la formule pour tout
indice de ligne
i entre
1 et
n :
det
A =
(-1)i+j aijdet
Aij.
où
Aij est la matrice extraite, c'est-à-dire la matrice
A privée de sa
i-ième
ligne et de sa
j-ième colonne.
Le membre de droite est fait avec des déterminants d'ordre
n-1 dont on sait qu'ils existent
et sont uniques par hypothèse de récurrence. Cela démontre l'unicité de det sur
Mn,n(K).
Démontrons
l'existence de det sur Mn(K).
Définissons une fonction sur
Mn(
K) provisoirement appelée
deti par la formule
deti
A =
(-1)i+j aijdet
Aij .
(développement par rapport à la
i-ième ligne) :
Elle vérifie
(
D1) :
justification
Soit
k l'indice de la colonne où l'on a remplacé
Ak par
aAk+
bBk et
la matrice extraite correspondant à la matrice
(
A1,...,
Bk,...
An). Dans la somme définissant
deti
A,
aik est remplacé par
aik+
bik et
Aik ne change pas ; par contre
pour
j différent de
k,
aij ne change pas et
det
Aij
est remplacé par
det
Aij +
det
en utilisant la propriété
(
D1) pour
det.
Elle vérifie
(D2) :
justification
Soit l'indice
k tel que les colonnes d'indice
k et d'indice
k+1 soient égales.
Les matrices extraites
Aij intervenant dans la formule
ont toutes deux colonnes égales et sont donc nulles
sauf les matrices extraites
Aik et
Ai k+1 qui sont égales :
deti
A =
(-1)i+k aikdet
Aik+
(-1)i+k+1 aikdet
Aik+1=0 .
Elle vérifie
(D3) :
justification
deti
In=(-1)j+j
det
In-1=1
L'unicité prouve de plus que les fonctions
deti ainsi définies
sont tous égales.
Matrice triangulaire
Si
A est une matrice triangulaire inférieure, le déterminant de
A est le produit de ses coefficients diagonaux
ai i : on a
.
Démonstration
On raisonne par récurrence. On développe par rapport à
la première colonne si la matrice est triangulaire supérieure et par
rapport à la dernière colonne si la matrice est triangulaire inférieure.
Exemple : Le déterminant de
est égal à fois le déterminant de
.
Par récurrence, il vaut
Matrice inversible et déterminant
Théorème : Le déterminant
d'une matrice carrée
A d'ordre
n est nul si et seulement si le
rang de
A est strictement inférieur à
n, c'est-à-dire si et
seulement si
A n'est pas inversible.
Démonstration :
- Si
rg A < n, un des vecteurs-colonne de
A est
combinaison linéaire des
n-1 autres. Donc
.
- Si
rg A = n, alors
A est inversible, on se ramène par des manipulations de colonnes
(par la méthode des pivots) à une matrice triangulaire dont les
éléments diagonaux sont tous non nuls. A chaque transformation,
le déterminant est multiplié par un scalaire non nul.
Donc,
.
Ainsi,
Théorème : Pour que
n
vecteurs d'un espace vectoriel de dimension
n forment une base, il
faut et il suffit que le déterminant de la matrice formée avec leurs
composantes dans une base quelconque soit non nul.
La valeur absolue du déterminant d'une base a une interprétation
géométrique si l'on utilise le produit scalaire naturels de l'espace
vectoriel
comme volume du parallépipède construit à partir de la
base.
Multiplicativité
Théorème : Si
A et
B sont deux matrices carrées d'ordre
n;
.
En particulier, si
A est inversible,
Démonstration :
Si
B n'est pas inversible,
A B ne l'est pas non plus et on a bien
0 = 0.
Si
B est inversible,
0. L'application
F : Mn(K)
K
définie par
vérifie
toutes les propriétés du théorème-définition (exercice).
Par unicité, on a donc
.
Transposition
Théorème :
Si
At est la
transposée
La transposée de la matrice
((aij)) est la matrice
((aji)).
Par exemple, la transposée de
est la matrice
.
de la matrice
A,
On peut ainsi développer le déterminant par rapport à une ligne et les propriétés du
théorème-définition restent vraies si on remplace les colonnes par les lignes.
Exercices
Exercice :
Des questions auxquelles il faut répondre très vite
Exercices :
-
Applications des règles de multilinéarité
-
Applications des règles de permutation
-
Applications de la multiplicativité
-
Produit
-
Calcul de déterminant I
-
Calcul de déterminant II
-
Calcul de déterminant "à la Gauss"
-
Déterminant paramétré
Déterminant paramétré
Exercice :
Déterminant et rang
Déterminant et vecteurs
Aire et déterminant
Théorème Dans le plan, l'aire du du parallélogramme formé à partir des
vecteurs
v1 et
v2 est égale à la valeur absolue du déterminant
de
v1 et
v2
Démonstration
L'aire du parallélogramme construit sur les deux vecteurs
(
a,
b) et
(
c,
d)
est égale à |
ad -
bc | : calculons l'aire de la moitié de ce parallélogramme qui
est un triangle
T.
Rappelons que l'aire d'un triangle ne change pas lorsqu'un des sommets se déplace
sur une parallèle au côté opposé :
Il ne reste plus qu'à découper le triangle
T en trois triangles
et à déformer chacun d'entre eux sans en changer l'aire jusqu'à obtenir
une figure remplissant la moitié d'un rectangle de côtés de longueur
a et
b
(et donc d'aire
ab) auquel on a enlevé un rectangle de côtés de longueur
c et
d
donc d'aire
cd.
Magique !
Théorème :
L'aire du parallélogramme formé à partir des
vecteurs
v1 et
v2 est égale à la norme du produit
vectoriel de
v1 et de
v2.
Démonstration
:
| Plaçons-nous dans le plan contenant les deux vecteurs
v1 et
v2.
L'aire
A à calculer est égale au produit de la longueur
du vecteur
v1
et de la longueur
h de la hauteur
correspondante. Le vecteur
w associé à cette hauteur
est la projection de
v2 sur la droite perpendiculaire à
v1.
Si
w1 = (-b,a) est le vecteur normal à
v1 = (a,b) de même norme, on a donc
|
Théorème :
Le volume du parallélépipède formé à partir des
vecteurs
v1,
v2 et
v3 de
est égal à la valeur absolue du déterminant de
v1 et de
v2 et
v3 calculée dans une base orthonormée.
Démonstration :
Le volume
V est égal au produit de l'aire
A du parallélogramme formé
par les vecteurs
v1 et
v2 et de la longueur
H de la hauteur du parallélépipède
correspondante. Cette hauteur est par définition perpendiculaire au plan engendré par les vecteurs
v1 et
v2. Si
w est le vecteur représentant cette hauteur, il est donc
colinéaire à
et c'est la projection du vecteur
v3 sur la droite engendrée par
.
Ainsi, on a
A =
Déterminant et vecteurs
Soit
E un espace vectoriel de dimension
n et
une base.
Définition :
Soit
(
v1, ... ,
vn)
n vecteurs. On appelle déterminant de
(
v1, ...
vn) dans la base
le déterminant
de la matrice des composantes des
vi dans la base
.
On le note
.
Proposition :
Le déterminant de
n vecteurs dans une base dépend de la base :
Si
' est une autre base, si
P est la matrice de passage
de
à
', on a
Produit mixte
Considérons un espace vectoriel
E de dimension
n muni d'un produit scalaire. Choisissons
une base orthonormée.
Soit muni du produit scalaire où
v = (
xi),
v' = (
x1',...,
xn'). Dans ce cas, la base canonique (
e1,...,
en) est orthonormée, c'est-à-dire vérifie si
i=
j et 0 sinon.
Théorème : Le déterminant de la matrice de passage
d'une base orthonormée à une autre base orthonormée
est égale à
1 .
Démonstration : la matrice de passage
P
vérifie
P Pt = Id. Donc on a
.
Une fois choisie une base orthonormée
,
le déterminant sépare les bases orthonormées en deux sous-ensembles :
- celles telles
que le
déterminant de la matrice de passage de
est égal à 1 (on les
appelle base orthonormée directe)
- celles dont le déterminant de la matrice de passage de
est égale à -1 (on les
appelle base orthonormée indirecte).
Définition : Soit
E un espace vectoriel
de dimension
n muni d'un produit scalaire (euclidien) et d'une base orthonormée
de référence.
On appelle produit mixte de
n vecteurs
v1,..., vn (on note aussi
(v1,..., vn)) le déterminant de
v1,..., vn dans la base
ou ce qui revient au même dans toute base orthonormée directe.
Produit vectoriel
Soit un espace vectoriel
E de dimension
n muni d'un produit scalaire et d'une base orthonormée
.
Définition : Soit
n-1 vecteurs
v1,...,
vn-1.
On appelle
produit vectoriel de
v1,...,
vn-1 l'unique vecteur
noté
tel que
pour tout vecteur
w de
E.
Un tel vecteur existe grâce au théorème suivant :
Théorème : Soit un espace vectoriel
E de dimension
n muni d'un produit scalaire.
Soit
f une forme linéaire de
E dans
. Alors,
il existe une unique vecteur
a dans
E tel que
.
Exemple : Prenons
n=2 :
le produit vectoriel de
v est le vecteur déduit de
v par une rotation
d'angle
: on doit en effet avoir
.
Si les composantes de
v,
w et
dans la base
sont respectivement
(a, b),
(x,y) et
(c,d), on doit avoir
ay - bx = cx + d y pour tous
x et
y dans
K.
Donc les composantes de
sont
(-b, a).
Produit vectoriel : propriétés
Les propriétés suivantes se déduisent de la définition
et des propriétés du déterminant :
-
Soit
i un entier entre 1 et
n-1. L'application
est linéaire :
Définition : On dit que est une
forme n-1-linéaire.
-
Définition : On dit que est une
forme n-1-linéaire alternée.
-
est perpendiculaire à chacun des vecteurs
vj
Démonstration :
ce qui est nul par la propriété
(D2') du déterminant
- Le calcul des composantes du produit vectoriel de deux vecteurs en dimension 3 est
une conséquence de la formule de développement par rapport à la dernière colonne :
Si
w est de composantes
(w1,..., wn) dans la base
et si
A est la matrice des vecteurs colonnes de
v1,...v(n-1) dans la base
,
on a
où
la matrice obtenue à partir de
A en enlevant la
i-ième ligne.
- Si les vecteurs
sont linéairement indépendants,
est non nul et la famille de vecteurs
forment une base
directe : le déterminant de ces vecteurs dans la base est strictement positif
.
On utilise aussi les déterminants dans le cas de systèmes linéaires qui ne sont
pas de Cramer.